Introduction du référentiel

Pourquoi et à qui s’adresse ce guide ?

Ce référentiel est destiné à accompagner les organisations (collectivités territoriales, institutions, associations…) dans leur maîtrise de l’impact environnemental de la donnée. Il offre des pistes dans l’élaboration de plans d’actions pour un numérique responsable, sur son volet data. Il est conçu et proposé par OpenDataFrance et ses partenaires.

L’objectif de ce guide est, d’une part, de sensibiliser les différents acteurs aux impacts de certaines pratiques rencontrées au sein des organisations et, d’autre part, de partager des exemples de bonnes pratiques numérique responsable qui peuvent participer à la réduction de l’empreinte environnementale du numérique à travers ce prisme de la donnée ouverte et de ses services associés.

Au sein des organisations visées, le numérique ne concerne pas uniquement la direction du numérique. D’autres services transverses comme les achats, les ressources humaines, la communication, les services généraux, etc. sont également impliqués.

Ce guide s’adresse à un large public en relation avec les systèmes d’information tels administrateurs systèmes et réseaux, développeurs, acheteurs, mais aussi naturellement leurs usagers, les directions dites « métiers » et en premier lieu les décideurs.


Pour des données ouvertes et maîtrisées

Quel numérique voulons-nous ?

Que ce soit pour les habitants usagers, agents des services ou les organisations elles-mêmes, le numérique déployé et utilisé aujourd’hui n’est pas soutenable. Les impacts éthiques, sociaux, environnementaux, ou encore de gouvernance, désormais largement connus, démontrent que ce numérique n’est pas adapté au monde de demain.

La transformation numérique de l’action publique est depuis longtemps à la recherche d’équilibres entre les gains de productivité et la qualité de services publics. Pour répondre à ces enjeux, il faut faire le choix d’innover pour longtemps et d’innover pour tous, en intégrant une forme de rationalité.

Nous le savons, le numérique (dont l’ouverture des données, sa mise à disposition et ses services associés), sont sources d’une empreinte environnementale non négligeable. Que ce soit majoritairement par les infrastructures et équipements nécessaires au déploiement de nouveaux services, ou encore aux ressources, dont l’eau et l’énergie, nécessaires à la disponibilité des services en continue, il est fondamental aujourd’hui d’aborder la question des services numériques en ayant une vision systémique de la maîtrise.

Ce travail propose d’explorer cette notion de maîtrise à trois niveaux:

  1. infrastructures et gestion de l’hébergement,
  2. la donnée et son cycle de vie,
  3. applications et services numériques proposés.

Ces trois dimensions identifiées offrent un large champ d’actions possibles. Nous proposons ici de les développer en 10 Bonnes pratiques de collecte, d’ouverture, et de mise à disposition des données afin de maîtriser au mieux leurs impacts.


Impact environnemental du numérique, état des lieux

Malgré l’opacité des méthodes et des données utilisées pour estimer l’impact environnemental du numérique, la littérature sur ce sujet s’accorde à affirmer que la matérialité du numérique impact l’environnement sur de nombreux secteurs, et ce de manière croissante. En voici quelques-uns :

  1. l’énergie : En 2021, le Shift Project évalue la part du numérique à 12% de la consommation totale d’électricité . A noter que la donnée représenterait approximativement de 15%. Que ce soit pour les centres de données, le maintien de l’infrastructure réseau ou de manière plus marginale les terminaux utilisateurs, la question de l’énergie est cruciale. Pour les collectivités, il convient notamment de s’assurer que l’énergie requise pour ses centre de données s’inscrit dans un plan de transition énergétique et que des critères de sobriété sont respectés.

  2. l’eau : 626 milliards de litres, c’est la quantité d’eau que les datacenters consommaient aux Etats-Unis en 2014. En France, peu de datacenters mobliseraient un refroidissement par circuit d’eau. Cependant, l’empreinte eau de la production d’électricité française serait de 4 L / kWh. Un impact indirect mais bien réel des besoins en ressource des centres de données.

  3. Gaz à effet de serre : le numérique représenterait 3 à 4 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) dans le monde et 2,5 % de l’empreinte carbone nationale. Si rien n’est fait pour en réduire l’empreinte ces émissions pourrait augmenter de manière significative : + 60 % d’ici à 2040, soit 6,7 % des émissions de GES nationales (pré-rapport de la mission d’information sur l’empreinte environnementale du numérique du Sénat),

  4. Les déchets : 53 mégatonnes (Mt) de Déchets d’Équipements Électriques et Électroniques (DEEE) ont été générés dans le monde en 2020, 12 Mt était attribuable à la zone Europe, à hauteur de 16,2 kg par personne (Vanessa Forti et al. «The Global E-waste Monitor 2020: Quantities, flows and the circular economy potential », United Nations University (UNU)) .


Sources: GreenIT, “Empreinte environnementale du numérique mondial”, 2019, via G.Roushille

Plusieurs leviers d’actions pour limiter l’impact environnementale du numérique :


Empreinte environnementale du numérique : évolution du cadre légal en France

Le cadre légal français, aussi rappelé dans ce guide « Bonnes pratiques numérique responsable pour les organisations » proposé par l’INR et la DINUM, incite les acteurs publiques et innovateurs à évaluer et maîtriser l’impact environnemental de leurs pratiques numériques. Que ce soit à travers la Loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (AGEC) ou la Loi visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique en France (REEN) , il convient de s’outiller pour mesurer et ainsi maîtriser l’empreinte environnementale des données, de ses infrastructures et services associés.

Au-delà notamment de la sensibilisation, de la maîtrise du renouvellement d’appareil, 2 dispositions visées par la Loi REEN nous semble important à rappeler ici :

  • Favoriser les stratégies numériques responsables dans les collectivités. Les communes et les EPCI de plus de 50 000 habitants devront avoir d’ici 2024 définit une stratégie numérique indiquant les objectifs liés à la réduction de l’empreinte du numérique sur l’environnement, et les mesures mises en place pour les atteindre.

  • Promouvoir la sobriété des centres de données . Aller vers des centres de données et des réseaux moins énergivores. Faire émerger une régulation environnementale pour prévenir l’augmentation des consommations et émissions des réseaux et des centres de données. Cette disposition va dans le sens des Plans climat-air-énergie (PCAET) visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique en intégrant par exemple le potentiel de récupération de chaleur des centres de données dans leur stratégie.

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Bonjour et merci d’avoir d’une part rédigé ce guide et de proposer ensuite un appel à commentaires pour le confronter aux expériences diverses de la communauté.

Je m’apprête à formuler quelques commentaires, ici à titre personnel qui n’engagent pas le point de vue de Datactivist. Ce dernier sera peut-être amené à en formuler d’autres, différents ou non, après concertation avec l’équipe si nécessaire.
Ce post constitue le propos liminaire des commentaires plus brefs qui suivront sur chacun des chapitres.

Depuis 10 ans, j’ai participé à plusieurs projets data pour plusieurs organisations, principalement des gestionnaires d’infrastructures qui ne touchent pas obligatoirement à des volumes de données démentiels. L’intérêt de ces projets a souvent été de former l’humain à de nouvelles méthodes de travail, de lui faire prendre conscience des synergies qui s’offraient à lui grâce aux données. Il était souvent question d’externalités, difficiles à envisager de prime abord et dont les moyens d’évaluation manquent encore cruellement.
Parallèlement à cela et dans une vision plus long terme, en continuité de mon engagement auprès du projet OpenStreetMap, mes sollicitations auprès d’acteurs publics pour libérer des données en avance des besoins qui surgiront à l’avenir n’ont cessé de s’intensifier depuis 2015. Tant et si bien que le temps nécessaire à leur aboutissement ne nous permet aujourd’hui que d’envisager des bribes de ce que nous pourrons faire demain (d’autres externalités encore).
C’est avec cette volonté de faire avancer les pratiques autour de l’opendata mais aussi d’une certaine lassitude que je pense mes commentaires utiles non seulement pour ce guide et aussi pour l’action à venir d’OpenData France.

Face aux impacts énoncés dans ce guide, j’aurais particulièrement à cœur de savoir ce que nous gagnons. Les externalités positives dont je parle ci-dessus ne sont pratiquement jamais quantifiées alors que c’est une clé de lecture nécessaire.

Dans l’introduction proposée, certains termes sont appelés à être précisés. Aucune ambiguïté ne devra perdurer dans la version finale de ce guide, parce que la question à laquelle vous tentez de répondre est trop importante.

Nous le savons, le numérique (dont l’ouverture des données, sa mise à disposition et ses services associés), sont sources d’une empreinte environnementale non négligeable

L’essentiel serait de préciser exactement de quelle empreinte s’agit-il ici pour l’opendata, avec des chiffres.
Sommes-nous seulement capables de décrire l’infrastructure IT des collectivités ayant amorcé une démarche d’ouverture de leurs données ?
Il me semble que c’est un pré-requis essentiel pour caractériser la contribution de ces démarches à l’empreinte globale dont nous avons tant de mal à caractériser le périmètre par ailleurs.

Au vu de la qualité de certains projets informatiques, je l’abordais ici même pour l’agglomération d’Annecy, qui n’ont pas jugé utile d’utiliser l’opendata comme fil conducteur, on pourrait formuler le corollaire à votre propos. Il faudrait encourager l’ouverture pour palier à l’impact négatif d’autres modes de restitution de l’information aux partenaires et citoyens sans apporter plus de chiffres. Saugrenu n’est-ce pas ?

Aller vers des centres de données et des réseaux moins énergivores

Dans l’optique de partir de l’infrastructure IT des collectivités mentionné ci-dessus, pouvez-vous nous préciser quelles grandeurs, quels seuils font la sobriété d’un datacenter ou d’un réseau s’il vous plaît ?
Est-ce le PUE ? Le WUE ? Une puissance moyenne ? Une durée d’opération ?

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bonjour

Tout d’abord merci pour ce travail. Comme François, les remarques ci-dessous, sont émises à titre individuel, n’engageant ni l’agglo de La Rochelle ni l’INR.

Impact environnemental du numérique, état des lieux : est-ce possible de rajouter quelques points renforçant la face sombre du numérique ? Tout d’abord l’extractivisme de terres rares (requises pour construire les appareils/terminaux/serveurs) qui confronte le court terme (besoin, salaires pour les populations travaillant dans les mines) et long terme (construction d’infrastructures pour accéder aux mines et exploiter le minerai, construction d’engins miniers, produits chimiques divers pour nettoyer le minerai). Suite à la découverte d’une nouvelle mine en Alaska, cet extractivisme pousse les Inupiats du détroit de Bering à questionner leur mode de vie/environnement fondé sur la chasse aux caribous pour ouvrir une nouvelle mine à haute valeur financière mais destructrice de cet environnement.En Alaska, les Inupiat tiraillés entre la richesse d’une mine de cuivre et la chasse au caribou

Sur les déchets : peut-être rajouté un paragraphe sur les circuits de traitement des déchets, le recyclage ne se faisant pas en France : par exemple La décharge de déchets électroniques d’Agbogbloshie, véritable défi économique et environnemental pour le Ghana

Il est difficile, dans nos environnements préservés, d’imaginer ce que pourrait apporter une politique Green Data, et je rejoins François sur ce point. Ce pourrait d’ailleurs être l’occasion d’une autre contribution OpenDataFrance/INR que de modéliser l’actuel et l’objectif. Ce pourrait aussi être un autre argument pour faire de l’open data un intrant au SI/un Eat your own food plutôt qu’un sortant non réutilisé par les Métiers (je parle de mon vécu), ce qui, souvent, relègue l’ouverture d’un JDD à « quand on aura le temps, pour l’instant on se focalise sur… ». Exemple récent : la dématérialisation totale des procédures de publications des actes administratifs.

Je finis par lancer une controverse sciemment sur la compensation carbone des EPCI ? de créer un fond carbone IT/SI au niveau de l’Etat pour financer des investissements (tant financier que ETP) dans les SI des EPCI leur permettant d’en réduire leur impact carbone ? pour l’instant les CEE ne peuvent pas servir à financer des projets IT/SI car les méthodologies n’existent pas.

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Bonjour,
Je profite de ce premier message pour remercier l’ensemble de l’équipe pour tout le travail accompli.
Plus bas mes remarques sur cette partie introduction.

L’Open data ne concerne pas forcément le B2B , il existe de nombreuses applications web ou mobile allant exploiter des données ouvertes.
Pourquoi avoir exclu les terminaux (end user devices et edge devices) des 3 niveaux de maitrise ?
Contrairement à ce qui est dit dans la suite de l’introduction, leurs impacts sont loin d’être marginaux. Le dernier kilomètre génèrent des coûts environnementaux et énergétiques des infrastructures réseaux sont très importants, et leur dimensionnement est directement lié à la quantité de données utilisées au quotidien par les usagers. Pour qu’un terminal utilisateur reçoive des données, il faut fabriquer et alimenter tout un ensemble d’équipement qui n’est généralement pas assimilé à de l’infrastructure : box, switch, routeurs, boitiers CPL, etc.

Le renouvellement des smartphones est directement lié à la saturation des disques durs internes (donc à la quantité de données stockées), la plupart des applications ne permettant pas la sauvegarde de données sur carte SD. La manière dont la transmission des données est gérée peut directement influencer la décharge de la batterie, et donc la consommation d’énergie en phase d’usage.

Il me semble qu’il faudrait reformuler les 3 niveaux de maitrise pour faire clairement apparaitre la prise en compte des terminaux utilisateurs et plus largement des équipements connectés en bout de ligne utilisant les données (d’autant plus que ceux-ci sont amenés à devenir de plus en plus nombreux), et supprimer la mention « marginal » associée à la question de l’énergie pour les terminaux utilisateurs.

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Bonjour François,
un grand merci pour la relecture de ce travail collectif et pour les éléments apportés sur les différentes bonnes pratiques, sincèrement !

C’est vrai, cette production ne met pas spécifiquement en avant les nombreuses externalités positives et les effets induits de la publication et de l’usages des données ouvertes.
Nous prenons bien note de ce point et rejoignons l’idée de nuancer ce propos. Sans renier la philosophie de l’open data et l’ouverture « par défaut » qui invite à publier toutes les données que la collectivité possède, le message vise ici à prioriser, privilégier, et standardiser au mieux les jeux de données. En particulier lorsque le volume ou le coût de mise à disposition est important.

Aussi, nous travaillons à quantifier et préciser au mieux cette notion d’empreinte et d’impact environnemental des données et de leurs services associés. Mais la complexité de ce sujet, des méthodes employées, et la maturité des outils nous orientent dans ce contexte à établir un état des lieux, certes incomplet, mais qui illustre une tendance.

Concernant la question de la sobriété de l’hébergement des données, nous avons une proposition de pistes d’actions, basées notamment sur les éléments du Code de conduite européen des centres de données, accessible par ici : 11 - Contrôler l'hébergement des données